Le doctorat est une formation à la recherche par la recherche, un processus qui nécessite un soutien collectif. On dit qu’il faut tout un village pour élever un enfant — il en va de même pour former un chercheur ou chercheuse. Les promoteurs et promotrices occupent une place centrale dans ce processus : il a par exemple été démontré que la supervision exerce une influence significative sur la persévérance doctorale (Wollast et al., 2023), l'obtention du doctorat (Cornér, Löfström, & Pyhältö, 2023), le bien-être des doctorantes et doctorants, ainsi que sur leur productivité en recherche (Paglis, Green & Bauer, 2006).
Cependant, la réussite d’un doctorat ne repose pas uniquement sur cette relation clé. La communauté académique au sens large est tout aussi importante. Les co-promoteurs ou co-promotrices, les collègues de laboratoire, ainsi que les mentors apportent un soutien émotionnel, informationnel et pratique précieux dont les doctorants et doctorantes ont besoin tout au long de leur parcours (Cornér, Pyhältö, Peltonen, & Bengtsen, 2018; McAlpine, 2013)
L’objectif de cette section est d’analyser les pratiques d’encadrement doctoral à travers les données recueillies auprès des titulaires de doctorat de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB). La première partie de ces analyses se focalise sur le rôle des promoteurs et promotrices dans l’accompagnement des doctorants et doctorantes. La seconde examine l’apport du comité d’accompagnement, en tant qu’instance de soutien et de suivi. Plus spécifiquement, il s’agit de mettre en lumière les conditions dans lesquelles les doctorants et doctorantes ont été encadrées. En croisant plusieurs dimensions telles que la charge d’encadrement des promoteurs ou promotrices, la fréquence des rencontres, le degré de satisfaction, l’utilité du comité d'accompagnement et le soutien perçu pour l'après-thèse, ce rapport vise à dégager des tendances et proposer des pistes d’amélioration pour renforcer la qualité de l’encadrement doctoral.
Qui sont les chercheurs et chercheuses interrogées ?
Les données utilisées dans ce rapport proviennent de l’étude « Devenir des titulaires de doctorat », menée par l'Observatoire et lancée en janvier 2022 en collaboration avec l’ensemble des universités francophones de Belgique. Bien que l’enquête s’adressait aux personnes diplômées entre janvier 2012 et mai 2021, les questions portant spécifiquement sur l’encadrement doctoral n’ont été posées qu’à celles diplômées entre juin 2018 et mai 2021. Étant donné la thématique de ce rapport, seules les réponses de ces personnes ont été prises en compte dans les analyses présentées ci-après.
L’échantillon final se compose donc de 857 titulaires de doctorat (46,5% de femmes, n = 398) issus des universités francophones de Belgique et de tous les domaines de recherche. Leur âge moyen est de 35,1 ans (SD = 6,1). Ces personnes ont obtenu leur doctorat au cours des 2,6 années précédant l'enquête (SD = 1.0) (en utilisant 2022 comme référence). La plus grande part des personnes ayant répondu (43,4%, n = 372) sont des titulaires de doctorat en Sciences exactes et naturelles (SEN), contre 31,3% (n = 268) en Sciences humaines et sociales (SHS) et 25,3% (n = 217) en Sciences de la vie et de la santé (SVS). La majorité de nos répondantes et répondants possèdent la nationalité belge (57,2 %, n = 490) et 40,2% (n = 322) ont indiqué travailler en dehors de la Belgique au moment de l'enquête.
Nous avons demandé aux titulaires de doctorat combien d’autres doctorantes et doctorants étaient encadrés simultanément par leur promotrice ou promoteur, en moyenne, pendant la durée de leur formation doctorale. La plupart des personnes ayant répondu, tous domaines de recherche confondus, ont indiqué que leur promoteur ou promotrice encadrait généralement entre 1 à 2 ou 3 à 4 doctorants ou doctorantes en plus d’elles-mêmes.
La figure ci-dessous présente la répartition du nombre de doctorantes et doctorants encadrés simultanément par un même promoteur ou une même promotrice, selon le domaine de recherche. Pour en faciliter l’interprétation, les effectifs ont été regroupés en trois catégories : 0 à 2, 3 à 4, et 5 ou plus.
Les analyses confirment l’existence d’un lien significatif entre le domaine de recherche et le nombre de doctorantes et doctorants encadrés simultanément. Les promoteurs et promotrices en SHS semblent encadrer un nombre moins élevé de personnes, tandis que ceux et celles en SEN et en SVS ont tendance à fonctionner en groupes plus larges, encadrant un plus grand nombre de doctorants et doctorantes en parallèle.
📌 Résumé : Nombre de doctorantes et doctorants encadrés simultanément
La plupart des personnes ont indiqué que leur promoteur ou promotrice encadrait généralement entre 1 à 2 ou 3 à 4 doctorantes ou doctorants en plus d’eux-mêmes.
Il existe un lien entre le domaine de recherche et le nombre de doctorants encadrés simultanément : SHS = Moins de personnes encadrées par promoteur ou promotrice ; SEN et SVS = Encadrement en plus grands groupes
Fréquence des rencontres : Nous avons interrogé des titulaires de doctorat (n = 836) sur la fréquence de leurs échanges avec leur promoteur ou promotrice (en présentiel ou à distance) afin de discuter de leur projet de recherche. Les réponses montrent une grande diversité : certaines personnes rencontrent leur promoteur ou promotrice plusieurs fois par semaine (n = 178), tandis que d’autres n’ont des contacts qu’une fois par mois (n = 156), voire moins (n = 168).
Lorsqu’on examine la fréquence des rencontres selon le domaine de recherche, on observe que les personnes en doctorat en SHS échangent moins fréquemment avec leur promoteur ou promotrice que celles issues d'autres disciplines. Alors que près de la moitié des personnes en SEN et SVS évoquent des rencontres au moins une fois par semaine, 60 % des doctorants et doctorantes en SHS déclarent n’avoir eu qu’un contact mensuel, voire moins.
Correspondance entre la fréquence des rencontres et les attentes : La littérature souligne l’importance de l’adéquation entre le soutien attendu par les doctorantes et doctorants et celui réellement reçu. Un soutien mal ajusté, c’est-à-dire perçu comme insuffisant ou inadapté est souvent lié à un sentiment d’insatisfaction (Pyhältö, Vekkaila, & Keskinen, 2015). Par exemple, une rencontre mensuelle avec son promoteur peut sembler suffisante si elle correspond aux attentes d'une doctorante, mais paraître trop espacée si un accompagnement plus soutenu est souhaité — ou, à l’inverse, trop fréquente si la doctorante aspire à davantage d’autonomie. C’est pourquoi nous avons demandé aux titulaires de doctorat si la fréquence des rencontres correspondait à ce qu’ils ou elles espéraient. Les résultats montrent que pour la grande majorité, la fréquence des rencontres correspondait à leurs attentes.
Parmi les 144 personnes (17,3%) ayant exprimé le souhait de rencontres plus fréquentes avec leur promoteur ou promotrice, plus de la moitié (56,3%) déclaraient ne le ou la voir qu’une fois par mois ou moins. Seuls 13% des doctorantes et doctorants rencontrant leur promoteur ou promotrice moins d’une fois par mois se disent satisfaits de cette fréquence. Si l’on se focalise sur le profil de ces 144 personnes ayant exprimé le souhait de rencontres plus fréquentes, on constate que 52,8% sont des femmes. La majorité sont issues du domaine des SEN (43,8%), suivies des SHS (34%) et des SVS (22%).
Une régression logistique a permis d’identifier les variables significatives associées à la probabilité d’appartenir au groupe des personnes ayant rencontré leur promoteur ou promotrice « autant qu’elles le souhaitaient », par opposition à celles l’ayant vu moins souvent. L’analyse, contrôlant pour le genre, le domaine de recherche et la fréquence des rencontres (classée en trois niveaux : (1) élevée (au moins une fois par semaine); (2) régulière (une à deux fois par mois); et (3) rare (moins d’une fois par mois), révèle les résultats suivants :
Avoir des réunions moins d’une fois par mois (« rare ») diminue significativement la probabilité de faire partie du groupe « autant que je souhaitais » (OR = 0,02); p < 0,001), en comparaison avec une fréquence élevée (au moins une fois par semaine).
La fréquence de réunions régulière d’une à deux fois par mois a également un effet négatif significatif sur cette probabilité (OR = 0,09 ; p < 0,001), comparativement aux rencontres fréquente au moins d'une fois par semaine.
Être dans le domaine des SHS augmente la probabilité de faire partie du groupe « autant que je souhaitais » (OR = 2,53 ; p < 0,001), en comparaison avec les (SEN).
Ces résultats suggèrent qu’il serait pertinent, tous domaines confondus, de viser au minimum une rencontre mensuelle avec son promoteur ou sa promotrice, tout en tenant compte des attentes spécifiques du ou de la doctorante. Il convient également de souligner que les besoins en encadrement peuvent varier selon le domaine de recherche et peuvent évoluer selon les étapes du doctorat : une personne généralement autonome peut, par exemple, avoir besoin d’un accompagnement renforcé lors de la phase de rédaction (McAlpine & McKinnon, 2013).
📌 Résumé : Fréquence des rencontres
Les réponses montrent une grande diversité : certaines personnes rencontrent leur promoteur ou promotrice plusieurs fois par semaine (n = 178), tandis que d’autres n’ont des contacts qu’une fois par mois (n = 156), voire moins (n = 168).
Les doctorants et doctorantes en SHS rencontrent moins fréquemment leur promoteur ou promotrice que ceux en SEN ou SVS.
Pour la grande majorité des doctorantes et doctorants, la fréquence des rencontres correspondaient à leurs attentes. Mais 17,3% des titulaires de doctorat interrogés auraient souhaité des rencontres plus régulières avec leur promoteur ou promotrice.
Une faible fréquence de rencontre (<1 fois/mois) est très fortement corrélée à l’insatisfaction de la fréquence des rencontres.
Nous avons interrogé les titulaires de doctorat sur le soutien apporté par leur promoteur ou promotrice à leur préparation à l’après-thèse. Selon ces résultats, 47,7% d’entre eux estiment que leur promoteur ou promotrice leur a fourni des conseils utiles pour leur avenir professionnel. En revanche, l’aide à la construction d’un projet professionnel recueille le plus faible taux d’accord, avec seulement 27,6% de réponses favorables.
Les titulaires de doctorat ont été invités à évaluer leur satisfaction vis-à-vis de l'encadrement de leur promoteur ou promotrice. Les personnes interrogées ont exprimé leur degré de satisfaction sur une échelle de cinq points allant de 1 = très insatisfait à 5 = tout à fait satisfait. Une proportion importante (79,9%) des titulaires de doctorat se déclarent (plutôt ou tout à fait) satisfaits de l'encadrement de leur promoteur ou promotrice. Ce pourcentage ne varie que peu selon le domaine de recherche.
Relation entre la fréquence des rencontres et la satisfaction par rapport à l'encadrement du promoteur ou promotrice : On observe une relation positive entre la fréquence des rencontres avec le promoteur ou la promotrice et le niveau de satisfaction des doctorants. Celles et ceux qui se déclarent les plus satisfaits sont également ceux qui bénéficient d’un suivi régulier, à raison d’au moins une rencontre hebdomadaire. À l’inverse, la proportion de personnes satisfaites diminue de manière significative dès que la fréquence des rencontres passe d’une fois par mois (77,6%) à moins d’une fois par mois (52,4%). Ces résultats indiquent qu’il serait, de manière générale, judicieux de viser un minimum d’une rencontre mensuelle afin d’optimiser la qualité de l’encadrement doctoral. Cependant, il est également important de noter que la fréquence idéale peut varier en fonction des besoins individuels, du stade d’avancement du projet ou encore du contexte disciplinaire. Adopter une approche flexible, centrée sur le projet et sur le doctorant ou doctorante, permettrait ainsi d’optimiser la pertinence et l’efficacité des échanges.
Nous avons demandé aux titulaires de doctorat si leur promoteur ou promotrice était la personne qui assurait leur encadrement au quotidien pendant leur doctorat. Parmi les personnes interrogées (n = 837), 30,2% ont répondu que leur promoteur ou promotrice n’était pas la personne qui assurait leur encadrement quotidien. Ce chiffre varie de 25,9% pour les SHS à 35,7% pour les titulaires de doctorat en SVS, qui présentent le pourcentage le plus élevé. Cela peut s’expliquer par la structure des grandes équipes de recherche, où l’encadrement quotidien est partagé avec d’autres membres du laboratoire, tels que des postdocs ou des logisticiens ou logisticiennes de recherche.
Dans l'enquête, un mentor était défini comme "une personne d’expérience qui vous guide, vous conseille et vous soutient en cas de doute ou d’échec afin de favoriser le développement de votre carrière". Nous avons ensuite demandé aux répondantes et répondants d'identifier la ou les personnes ayant joué ce rôle au cours de leur doctorat et/ou dans la période suivant la soutenance. Dans le cadre de cette question, les participantes et participants avaient la possibilité de sélectionner plusieurs réponses.
Parmi les titulaires de doctorat ayant répondu à cette question (n = 1156), un peu plus de la moitié (54,5%) ont désigné leur promoteur ou promotrice comme mentor, tandis que 20,9% ont mentionné leur co-promoteur ou co-promotrice. Il est également à noter que 241 personnes (20,9%) ont indiqué ne pas avoir un mentor. Parmi les personnes ayant sélectionné la catégorie « autre », le groupe le plus fréquemment mentionné était un membre de leur famille.
📌 Résumé : Soutien de la part du promoteur ou de la promotrice
Seuls 47,7% des titulaires de doctorat estiment avoir reçu des conseils utiles pour leur avenir professionnel. 27,6% seulement ont été aidés pour construire un projet professionnel.
54,5% des titulaires de doctorat considèrent leur promoteur ou promotrice comme mentor.
30,2% déclarent que leur promoteur ou promotrice n’assurait pas l’encadrement quotidien, surtout en SVS (35,7%).
79,9% déclarent être satisfaits de l’encadrement de leur promoteur ou promotrice. La plupart entre celles et ceux qui se déclarent satisfaits sont également ceux qui bénéficient d’un suivi régulier, à raison d’au moins une rencontre hebdomadaire. À l’inverse, la proportion de personnes satisfaites diminue de manière importante dès que la fréquence des rencontres passe d’une fois par mois à moins d’une fois par mois.
Bien que les relations de supervision individuelles soient un facteur clé de réussite du doctorat, le suivi de la thèse avec un comité d'accompagnement qui implique la collaboration entre plusieurs encadrants et encadrantes, apportant chacun et chacune une contribution complémentaire, s’est largement formalisé et systématisé au fil des années (Pyhältö, Tikkanen, & Anttila, 2024). En FWB, le comité d’accompagnement reflète cette dynamique collaborative. Il est composé du promoteur ou de la promotrice et d'au moins deux membres titulaires d’un doctorat. Sa mission est de guider le doctorant ou doctorante dans l’orientation de ses recherches, d’élargir son réseau scientifique et de contribuer à l’élaboration de son programme de formation. Les membres s’engagent à un suivi régulier et à un dialogue constant tout au long du parcours doctoral. De plus, les règlements universitaires précisent explicitement que le comité doit se réunir "au moins une fois par an".
Fréquence des rencontres : Nous avons interrogé des titulaires de doctorat (n = 836) sur la fréquence de leurs échanges avec leur comité d'accompagnement (en présentiel ou distanciel) afin de discuter de leur projet de recherche. Plus de la moitié des personnes interrogées déclarent rencontrer leur comité de thèse "une fois par an". Toutefois, 5,5% indiquent ne l'avoir jamais rencontré et, pour 28,8% des répondantes et répondants, la fréquence était "moins d'une fois par an".
La fréquence des rencontres avec le comité d'accompagnement varie selon le domaine de recherche. Les personnes en doctorat en SVS échangent plus régulièrement avec leur comité d'accompagnement que celles issues d'autres disciplines. Ainsi, 41,7% des personnes en SEN et 36,7% en SHS rencontrent leur comité moins d'une fois par an, voire jamais, contre 18,9% des doctorants et doctorantes en SVS.
Ces résultats sont interpellants. Bien que la tenue d’au moins une réunion par an soit prévue dans tous les règlements universitaires, les données démontrent que cette exigence n’est pas respectée en pratique. Il apparaît donc essentiel de renforcer la régularité des réunions du comité d’accompagnement, compte tenu de la faible fréquence des rencontres signalée par certains titulaires de doctorat.
Utilité du comité d'accompagnement : Nous avons demandé aux titulaires de doctorat (n = 836) si leur comité d'accompagnement a été utile à l'avancement de leur recherche tout au long du doctorat. Pour 36,6% des titulaires de doctorat, le comité d'accompagnement n'a pas été (pas du tout ou pas très) utile. Ce pourcentage est de 43% pour les titulaires de doctorat en SEN contre 31,5% des SVS et 32% des SHS.
Relation entre la fréquence des rencontres et la perception de l'utilité du comité d'accompagnement : On observe une relation positive entre la fréquence des rencontres avec le comité de thèse et la perception de son utilité. Les personnes qui jugent le comité de thèse utile sont également celles qui le rencontrent plus fréquemment (au moins une fois par an). Ces résultats suggèrent qu’en règle générale, il serait pertinent de viser au minimum une rencontre annuelle avec le comité, afin de maximiser son apport.
📌 Résumé : Comité d’accompagnement : fréquence et utilité
Plus de la moitié des titulaires de doctorat ont rencontré leur comité une fois par an, tandis que 34,3% ont rencontré leur comité moins d'une fois par an, voire jamais.
Davantage de régularité en SVS (seulement 18,9% avec peu ou pas de rencontres).
43% des titulaires de doctorat en SEN jugent le comité peu ou pas utile. Ce taux est moins élevé en SVS (31,5%) et SHS (32%).
Il existe une corrélation positive entre la fréquence des rencontres et la perception de l'utilité du comité d'accompagnement.
Il est pertinent d’examiner les variables susceptibles d’influencer le niveau de satisfaction des titulaires de doctorat vis-à-vis de leur encadrement. Est-ce la fréquence des réunions ? Le soutien apporté pour l’après-thèse ? Le nombre de doctorants ou doctorantes encadrées par le promoteur ou la promotrice ? Ou encore certaines disciplines sont-elles associées à une meilleure perception de l’encadrement ?
Pour répondre à ces questions et identifier les facteurs corrélés à la probabilité d'appartenir au groupe des titulaires de doctorat s’étant déclarés « tout à fait satisfaits » de l’encadrement de leur promoteur ou promotrice (soit 48,4 %), des modèles de régression logistique ont été réalisés. L’analyse a été menée par étapes :
Étape 1-variables démographiques : le genre (femme = 1), l’âge, et la nationalité (Belge = 1).
Étape 2-variables liées au doctorat : le grand domaine de recherche (SHS, SVS, référence : SEN), le nombre d’années écoulées depuis l’obtention du doctorat, la durée du doctorat, et le fait d’avoir bénéficié d’un financement pendant le doctorat (oui = 1).
Étape 3-variables relatives à l’encadrement : la fréquence des rencontres avec le promoteur (régulière, rare ; référence : fréquent), la satisfaction vis-à-vis de cette fréquence (oui = 1), le nombre de doctorants encadrés (5 ou plus ; 3-4 ; référence : 0-2), le fait que le promoteur ou la promotrice assure l’encadrement au quotidien (oui = 1), qu’il ou elle soit considérée comme mentor (oui = 1), ainsi que la moyenne de trois items mesurant le soutien pour l’après-thèse (voir ici).
Les résultats indiquent que le modèle a fourni une amélioration statistiquement significative par rapport au modèle comprenant uniquement le terme constant, χ2 (8) = 288,59, p<0,001. La qualité de l’ajustement comme indiqué par le pseudo R2 de Nagelkerke était de 0,43 (Cox and Snell = 0,32). Le tableau ci-dessous présente le modèle final qui a été privilégié.
L’analyse de régression révèle que, toutes choses étant égales par ailleurs, plusieurs facteurs influencent la probabilité pour un doctorant ou une doctorante de se déclarer « tout à fait satisfait(e) » de l’encadrement de son promoteur ou de sa promotrice :
Être de nationalité belge réduit cette probabilité.
Le nombre d’années passées à poursuivre le doctorat diminue de manière significative la probabilité d’être très satisfait ou satisfaite.
La fréquence des rencontres avec le promoteur ou la promotrice joue également un rôle important. En effet, les doctorants et doctorantes qui ont des rencontres rares ou occasionnelles avec leur promoteur ou promotrice sont moins susceptibles de se déclarer totalement satisfaites de leur encadrement, comparativement à ceux et celles bénéficiant de rencontres fréquentes.
Par ailleurs, la satisfaction quant à la fréquence de ces rencontres est un facteur clé : les personnes déclarant avoir rencontré leur promoteur ou promotrice autant qu'elles souhaitaient ont une probabilité beaucoup plus élevée d’appartenir au groupe des doctorants « tout à fait satisfaits » de leur encadrement.
De plus, l’implication du promoteur ou de la promotrice dans l’encadrement quotidien constitue également un facteur positif qui augmente la probabilité d'être très satisfait(e).
Enfin, les doctorants et doctorants percevant un accompagnement actif pour leur avenir professionnel après la thèse sont plus susceptibles de se déclarer très satisfaits.
Le graphique ci-dessus montre plus visuellement quelles variables sont associées à la satisfaction vis-à-vis du promoteur ou de la promotrice, ainsi que le degré de certitude de ces résultats. Les carrés représentent l’effet de chaque variable sur la satisfaction. Les barres horizontales correspondent aux intervalles de confiance, c’est-à-dire le degré de précision de l’estimation. La ligne verticale de référence, placée à 1, indique l’absence d’effet. Si l’intervalle de confiance inclut 1 et croise donc la ligne, cela signifie que l’effet de la variable n’est pas statistiquement significatif. L’odds ratio (OR) compare la probabilité d’être satisfait selon deux groupes :
Un OR de 1 signifie que la satisfaction est aussi probable dans les deux groupes (tout à fait satisfait vs autres).
Un OR supérieur à 1 indique que le groupe étudié (ex : doctorants satisfaits de la fréquence des rencontres) a plus de chances d’être tout à fait satisfait que le groupe de référence (ex. doctorants insatisfaits de la fréquence des rencontres).
Un OR inférieur à 1 indique au contraire que le groupe étudié (ex : suivi rare) a moins de chances d’être tout à fait satisfait que le groupe de référence (ex : suivi fréquent).
En somme, la satisfaction des doctorantes et doctorants semble être fortement liée à l’implication concrète des promoteurs et promotrices, tant en termes de temps (fréquence et régularité des rencontres, présence pour l'encadrement quotidien) que de soutien, notamment pour la suite du parcours professionnel. Le facteur qui ressort le plus clairement est la satisfaction vis-à-vis de la fréquence des rencontres : ce n’est pas uniquement la fréquence objective qui compte, mais surtout la perception positive qu’en ont les doctorants et doctorantes. Et aucun effet significatif du nombre de doctorants encadrés n’a été observé. Il convient de souligner que ce type d’analyse permet d’identifier des corrélations entre variables, et non des relations de causalité.
Ces résultats, issus des réponses de 857 titulaires de doctorat de la FWB, apportent un éclairage sur les conditions d’encadrement vécues durant le doctorat. En examinant plusieurs dimensions, telles que la charge d’encadrement des promoteurs et promotrices, la fréquence des rencontres, le degré de satisfaction, l'utilité du comité d'accompagnement et le soutien perçu pour l’après-thèse, cette analyse met en évidence des tendances clés et identifie des leviers d’amélioration pour renforcer la qualité de l’encadrement doctoral.
Cependant, il convient de souligner une limite importante de ces données: elles proviennent exclusivement de personnes ayant soutenu leur thèse avec succès. Nous ne disposons d’aucune information sur les doctorantes et doctorants ayant abandonné leur parcours doctoral. Par conséquent, ces résultats ne sont pas nécessairement représentatifs de l’ensemble de la population doctorale en FWB et doivent être interprétés avec une certaine prudence. De plus, il faut rester prudent quant à l'interprétation de ces résultats : ni la causalité, ni la direction des effets, qu’ils soient unidirectionnels ou bidirectionnels, ne peuvent être déduites de ces données.
Malgré ces limites, l’analyse permet de dégager plusieurs pistes d’amélioration. Elle souligne notamment l’importance de clarifier les attentes en matière de suivi, de favoriser des échanges réguliers et adaptés aux besoins spécifiques des doctorants et doctorantes, et de mieux définir le rôle du comité d’accompagnement dans l’avancement du projet doctoral. Sur cette base, plusieurs recommandations peuvent être formulées.
🎯Renforcer le rôle et la régularité du comité d’accompagnement et clarifier les rôles et les attentes
Le comité d’accompagnement constitue, en principe, un véritable pilier du parcours doctoral. Il est important, dès le départ, de définir le cadre du fonctionnement du comité : fréquence et modalités des rencontres, attentes vis-à-vis du doctorant ou de la doctorante, ainsi que contributions attendues de chaque membre. Cette discussion initiale entre les membres du comité et le doctorant ou la doctorante permettra non seulement de vérifier si les partenaires partagent une vision commune, mais aussi de s’accorder concrètement sur le fonctionnement quotidien et les attentes de chacun et chacune, afin d’éviter les malentendus ou les déceptions.
L’élaboration d’un « guide du comité d’accompagnement » peut servir de référence concrète pour préciser le fonctionnement du comité, tout en clarifiant les rôles et les engagements réciproques. Une charte qui formalise un accord entre le doctorant ou doctorante, et les membres du comité d’accompagnement comme « accord de partenariat du comité d’accompagnement » peut également être utile. Cette charte, établie dès le début de la thèse, pourrait établir les dates de réunions provisoires, constituer une base pour encadrer les modalités de collaboration et clarifier les engagements mutuels.
📌 Exemples de bonnes pratiques
L’Université Paris-Saclay a élaboré un « Guide du comité de suivi » destiné aux membres des comités d’accompagnement des doctorants et doctorantes. Ce document précise clairement ce qui est attendu de leur rôle, rappelle les règles relatives à l’organisation et au fonctionnement des comités, et propose des ressources ainsi que des réponses aux questions les plus fréquemment posées.
L’Université de Toulouse fait signer une charte qui formalise un accord entre le doctorant ou doctorante, ou le promoteur ou promotrice de thèse, mais aussi le co-promoteur ou co-promotrice, directeur ou directrice de l’unité de recherche, et directrice et directeur de l’école doctorale et l’établissement auprès duquel s’inscrit le doctorant ou doctorante.
Une université sud-africaine a initié un projet ou les doctorants et doctorantes, postdocs et promoteurs ou promotrices ont réfléchi à la pratique de la co-promotion. Deux lignes directrices en sont issues : ce que les co-promoteurs et co-promotrices encadrants doivent clarifier en amont (page 4), et comment accompagner un co-promoteur ou co-promotrice sans expérience (page 5).
🎯Porter une attention particulière à la composition du comité d’accompagnement
La qualité de l’accompagnement dépend aussi de la composition du comité. Il peut être judicieux de désigner, au sein du comité, une personne « présidente » distincte du ou de la promotrice. Cette personne pourrait jouer un rôle de garante du bon déroulement du processus, en assurant notamment la convocation, l’animation et le suivi des réunions, ainsi que le respect des échéances liées au dépôt du rapport annuel (voir ci-dessous). Ce choix peut favoriser une répartition plus équilibrée des responsabilités et consolider le bon fonctionnement du comité.
L’ouverture du comité à un membre issu du monde non académique constitue également un atout : elle permet d’enrichir les perspectives et d’anticiper plus concrètement la transition professionnelle du doctorant ou de la doctorante après la thèse.
Enfin, la composition du comité doit être réfléchie avec soin, en veillant particulièrement à prévenir tout conflit d’intérêts potentiel entre ses membres.
📌 Exemple de bonne pratique
À l’université de Lyon, lors de chaque réunion du comité d’accompagnement, tous les doctorantes et doctorants ont la possibilité de s’entretenir en privé avec le membre du comité extérieur à l'école doctorale. Cet échange constitue une occasion pour ces personnes d’exprimer leur point de vue sur l’avancement de votre thèse. C’est ce membre extérieur qui est ensuite chargé de rédiger le rapport concernant le travail de thèse.
🎯Structurer les réunions du comité d’accompagnement autour d’objectifs clairs et de thématiques bien définies, avec la production systématique d’un rapport annuel co-signé
La mise en place, dans l’ensemble des universités de la FWB, d’un rapport annuel co-signé par le comité d’accompagnement à la commission doctorale concernée permettrait d’harmoniser les pratiques et de gagner en clarté. Pour assurer l’efficacité de ce dispositif une date limite unique et claire pourrait être fixée pour le dépôt du rapport ; et des rappels automatiques pourraient être envoyés aux doctorants et doctorantes et aux membres des comités n’ayant pas encore soumis le rapport à cette échéance.
Les réunions du comité d’accompagnement gagnent à être organisées autour de thématiques bien définies. Cette structuration permet d’assurer un suivi rigoureux et de clarifier les attentes de toutes les parties. Les points suivants peuvent notamment être abordés :
l’état d’avancement des travaux, le respect du calendrier global et l’ajustement des objectifs si nécessaire ;
les obstacles rencontrés et les solutions envisagées ;
les besoins en formation complémentaire (méthodologie, outils, compétences transversales) ;
les perspectives de valorisation des travaux (publications, communications, transfert de connaissances) ;
les opportunités de mobilité internationale ;
les projets de carrière post-thèse et les actions à envisager en ce sens ;
le ressenti du doctorant ou de la doctorante sur son expérience, afin de lui offrir un espace d’expression ;
la planification de la prochaine réunion.
📌 Exemples de bonnes pratiques
Le compte rendu du comité d’accompagnement de l’Université de Lyon inclut plusieurs rubriques clés : formations nécessaires au bon déroulement du doctorat, le déroulement de la thèse y compris les conditions dans lesquelles la thèse est réalisée (aspects matériels, psychologiques, relationnels, etc.), la valorisation de la thèse (publications etc.) et enfin le planning et calendrier. Le compte rendu comprend une section de commentaires confidentiels, réservée à la doctorante ou au doctorant. Cette partie permet à l’Ecole Doctorale d’avoir une vision sur la perception par la doctorante ou le doctorant du déroulement de l’année de thèse faisant l’objet de la réunion.
Le règlement de l’Université de Mons prévoit une organisation en trois temps des réunions du comité d’accompagnement : "Dans un premier temps, il entend le doctorant et évalue l’avancement des travaux de ce dernier. Dans un deuxième temps, le Comité entend le doctorant sans la présence de son promoteur et copromoteur éventuel. Il offre également à ces derniers la possibilité de s’exprimer en l’absence du doctorant. " Cette structuration vise à garantir un espace d’expression équilibré pour toutes les parties prenantes, dans le respect des principes d’accompagnement et d’évaluation.
🎯Clarifier les rôles dans les équipes de recherche
Mettre en place une procédure d’accueil et d’intégration systématique pour tout nouveau chercheur ou toute nouvelle chercheuse rejoignant une équipe, en particulier les profils internationaux. Cette procédure vise à les familiariser avec les pratiques et l’organisation de l’unité, et à leur permettre d’identifier clairement les rôles, les droits et les devoirs de chacun, y compris les leurs, au sein de l’équipe.
Définir les responsabilités d’encadrement quotidien, surtout dans les grandes équipes, afin de mieux structurer le soutien offert aux doctorants et doctorantes et d'éviter qu’ils et elles ne se retrouvent avec peu d'accompagnement dans leur parcours.
Formaliser le rôle des personnes assurant l’encadrement quotidien, notamment en leur attribuant un statut clair, comme celui de co-promoteur/co-promotrice, de membre du comité d’accompagnement, ou encore de promoteur/promotrice adjointe. Cela permettrait de reconnaître officiellement leur investissement, de clarifier les attentes, et d’assurer une continuité et une cohérence dans le suivi doctoral.
📌 Exemple de bonne pratique
L'Imperial College London a formalisé le rôle des postdocs dans l’encadrement doctoral en leur attribuant le statut de "promoteur ou promotrice adjointe" (assistant supervisor). Le processus de nomination, le cadre d’accompagnement pour leur développement professionnel, ainsi que leurs rôles et responsabilités, sont clairement définis et encadrés.
🎯Renforcer un encadrement doctoral personnalisé, évolutif et de qualité, soutenu par la formation des promoteurs et promoteurs
Encourager chaque promoteur ou promotrice à se former spécifiquement à son rôle de supervision, distinct de celui d’enseignement ou de recherche. Cette fonction implique le développement de compétences clés telles que : la capacité à fournir un feedback constructif, une communication bienveillante, ainsi que des compétences générales en leadership, en gestion d’équipes et de conflits.
Personnaliser l'encadrement en fonction des besoins individuels de chaque doctorant et doctorante (ex : autonomie), de la phase du doctorat (ex : démarrage, collecte/analyse des données, rédaction, finalisation), et de la complexité du projet.
Clarifier mutuellement les attentes dès le début du doctorat, notamment en ce qui concerne la fréquence des réunions et la répartition des responsabilités, puis les réévaluer régulièrement au fil de l’avancement du projet.
Reconnaitre que les normes d’encadrement varient, mais que des seuils minimums doivent être garantis (par exemple, au minimum une rencontre mensuelle entre le promoteur ou la promotrice et le doctorant ou la doctorante).
Garantir des dispositifs et designer des interlocuteurs confidentiels en cas de difficultés d’encadrement (médiateurs, conseillers bien-être, référents éthiques, etc.). Informer les doctorants et doctorantes, dès le début de leur parcours notamment lors des journées d’accueil ou via les guides et plateformes doctorales.
Reconnaître et valoriser une supervision de qualité.
📌 Exemples de bonnes pratiques
L'UMons a récemment établi une charte doctorale définissant un cadre clair de collaboration équilibrée entre le doctorant ou la doctorante et ses (co-)promoteurs ou (co-)promotrices, afin d’aligner les attentes mutuelles et de favoriser une relation constructive.
PhD-supervisor charter de KULeuven clarifie les attentes et responsabilités mutuelles.
Plusieurs universités en Allemagne ont mis en place des prix de la supervision, attribués sur la base de nominations par les doctorants et doctorantes : https://gc.gs.tum.de/supervisory-award/
Irish National Academy for Integration of Research, Teaching and Learning Guide: Developing an institutional framework for supporting supervisors of research students : https://cora.ucc.ie/bitstreams/0251cf41-4bfc-48c0-8f77-0b059ebe5549/download
🎯Favoriser la création de réseaux de pairs afin de réduire le risque d’isolement
Encourager les échanges informels, surtout dans les disciplines où le travail se fait de manière plus individuelle (ex : SHS), et/ou où les rencontres avec les promoteurs, promotrices ou le comité d’accompagnement sont plus rares. Par exemple, des réunions de présentation des travaux entre différentes unités d’une même faculté peuvent être encouragés et organisés régulièrement.
Soutenir la mise en place de groupes de doctorants et doctorantes pour permettre un soutien mutuel (groupes de relecture, cercles de discussion, etc.).
📌Exemples de bonnes pratiques
Les PhD House de l’Université de Liège et de l’Université de Mons et la PhD & Postdoc Society de l’ULB mettent en place des espaces dédiés pour encourager le réseautage, la collaboration et les échanges entre jeunes chercheurs et chercheuses.
Le programme REFERENT est une initiative de mentorat visant à organiser un soutien entre pairs en matière de santé mentale au sein de l’association Marie Curie.
🎯Proposer davantage de soutien à l’insertion professionnelle
Intégrer des activités de développement professionnel dans le cursus doctoral (ateliers, bilans de compétences, mentorat externe).
Encourager les promoteurs et promotrices à discuter des perspectives post-thèse avec leurs .
📚 Pour aller plus loin :
Marie Skłodowska-Curie Actions Supervision Guidelines (2025)
Eurodoc Statement on Doctoral Supervision (2025)
Insights from practice: A handbook for supervisors of modern doctorate candidates (2017)
Autrice
Neda Bebiroglu, Conseillère scientifique et coordinatrice, Observatoire de la Recherche et des Carrières Scientifiques
Contact
🌐https://observatoire.frs-fnrs.be
🖇️https://www.linkedin.com/company/observatoire-frs-fnrs